Théo Jansen ou l’art du mouvement
Outre le cinéma auquel j’affectionne une attention particulière, l’art que je conçois ne bouge pas. Il est statique et ne peut s’aminer que par la force de mon imagination. Il vit dans les musées entre 4 morceaux de bois, dans les feuilles glacées des livres, s’affirme par la présence de couleurs, de matières, de ce mesclun fond/forme qui suit trop souvent une logique de masturbation intellectuelle. Je mets de côté ce plaisir pompeux, tonitruant de non-sens, et m’abandonne, le temps d’une brève ouverture d’esprit, à une autre conception. L’art cinétique. La racine « -ciné » du mot m’inspire confiance et chamboule (un peu) mon étroite certitude, ma vaine compréhension des choses. Suis-je assez objectif ?
Je continue. Je passe la première vitesse cérébrale. Art cinétique, locution – art qui se compose d’œuvres avec des parties en mouvement, me dit linternaute.com. L’art est comme mis en contribution directe avec l’environnement dans lequel il évolue. Ces mouvements peuvent être dus à l’air, au soleil, à l’eau, à un moteur ou encore au spectateur. Autonome donc, écolo. Ma perception s’élargit. Alexander Calder et ses morceaux de fer qui ondulent, Victor Vasarely et ses illusions d’optique (véritable drogue visuelle) et Jean Tiguelly et sa fontaine Stravinsky. D’accord, c’est un changement dans l’art des années 60, mais, s’il vous plait, qu’on m’enlève l’idée de comparer cet art avec un vulgaire moulin à vent multicolore qui fait le bonheur de ‘x’ bambins hurlant dans une fête foraine. Quel horrible pataquès !
Heureusement que Théo Jansen et ses créatures ont su émoustiller mon esprit. Sinon honte à moi, tout cela se serait logé au fin fond de mon lobe frontal, à côté des croûtes de la Tate Modern. Son art est immense, gigantesque. Autant vous dire qu’on nous a menti, la guerre des mondes de Wells ne fait pas partie des romans d’anticipation S.F., mais bien de la docu-fiction. Au gré du vent, ses Strandbeesten (animaux des plages en néerlandais) monopolisent les côtes, le temps d’une sortie, et subjuguent par leur incroyables grandeur et autosuffisance. Ces sculptures, assemblage de grosses allumettes, me permettent de comprendre et d’imaginer plus ou moins, toute l’avidité que je puisse porter en cet art. Je pense que le mot « art » n’est ici plus opportun, car trop sérieux, voire prétentieux. Disons que Théo s’amuse juste comme un petit fou, au même titre que l’enfant avec sa montagne de Lego.