UKNW SOUNDS : DEPTFORD GOTH (UK)
On ne serait dire si ce pseudonyme renvoie au code vestimentaire « goth » ou au nom du quartier naval de l’East South londonien. Ce n’est ni l’un ni l’autre. Cet alchimiste vient de Peckham et n’a définitivement rien à envier aux gothiques. Bien que surprenant, l’origine de ce nom reste un mystère. Tout comme les sons, les échos, les vibrations charnelles de ce cher Daniel Woolhouse. Mécanique implacable, obsédante… Telle une carapace musicale forgée avec tant d’épaisseur et d’ardeurs qu’elle arrive, avec l’album ‘Life After Defo’, à renaître plus éclatante encore et à s’élever langoureusement vers les cieux.
Sorti d’une formation dans l’assistanat scolaire, Woolhouse ne semblait pas destiner à produire tant de passions musicales. Après avoir appris la guitare comme un gamin, il arrive fraichement et courageusement sur MySpace en 2010 avec ‘Real Love Fantasy’, sorte de trip sensoriel irritable qui le place directement dans une musique expérimentale déchue, en laissant tout de même entrevoir le génie de son LP.
Un calme cosmique règne sur ‘Life After Defo’ : la lenteur clinique tout en retenue et en maitrise de ‘Bronze Age’ et ‘Guts No Glory’, la berceuse minimaliste ‘Lions’, les orchestrations entrainantes sur les beats de ‘Feal Real’ et de ‘Union’, le tout accompagner de sa voix monocorde et fantomatique, faisant passer James Blake et The xx pour des prétentieux. Ses clips hand-made sont le reflet cliquant de sa musicalité, projetant des images floues et feutrées aux teintes cliniques et aseptisées. Son premier clip publié ‘Union’ plante le décor : balade bucolique à travers bois, ballons bourrés d’hélium noué aux poignés, semblant le tiré vers le haut. A l’inverse, il chante les yeux cloués au sol, pieds enracinés au sol, dans sa réalité. Pour enfin lâcher prise face à l’horizon, et laisser vaguer ses balles chromatiques dans l’air amniotique. Tout est là, toutes ses sonorités revues et corrigées pour présenter une métaphore nuancée de la retenue.
Tour de force saisissant, Woolhouse arrive à transmuter, non pas les métaux précieux d’un l’alchimiste, mais les harmonies électroniques pour nous offrir la plus belle pierre philosophale.
Julien Catala