Au pays du soleil de minuit…
Déjà 8 mois que nous étions sur les routes. Traversant le continent Européen, d’est en ouest, du nord au sud, mêlant une multitude de décor et de culture, allant du simple paysage de carte postale aux fjords embrumés du grand nord scandinave, du bruit des villes au calme des grands espaces, des troupeaux d’animaux sauvages aux amas de voitures, avec toujours ce contraste entre l’homme et la nature, qui ne cessa de s’amplifier plus nous avancions vers le Nord.
Après deux milles kilomètres de traversée, nous arrivions enfin en Laponie Norvégienne. Nous laissions derrière nous lacs et forêts suédois pour ces plateaux séchés par le froid hivernal et les vents glacials. Nous avions parcouru la Suède, de bas en haut, dans le but de se rendre au fameux Nordkapp. Il nous restait que 400 kilomètres entre nous et notre destination. Ce célébrissime lieu est le point le plus septentrionale d’Europe, situé bien au dessus du cercle Arctique, là où la nuit n’existe plus durant l’été. Nous y étions un 15 juin, précisément la date où le soleil est au plus haut. Il nous était difficile de s’imaginer apercevoir le soleil à minuit, d’autant que le ciel est souvent gris dans ces régions-là. D’après les locaux, il ne fait beau qu’un jour sur sept, et encore, faut-il qu’il y ait des éclaircies au moment voulu.
La route y menant est tout simplement fabuleuse. Un seul et unique tronçon de béton sillonne le paysage, jouant avec les fjords vertigineux, du plus proche de l’océan à 400 mètres au dessus du vide, toujours en longeant la côte, où parfois, il n’est pas rare d’entrevoir des dauphins se joignant à notre avancée. Souvent, le vent et la pluie sont de la partie. Cette association crée une atmosphère particulière, comme si l’Homme n’était pas le bienvenu ici, où plutôt, comme s’il devait obligatoirement se soumettre à cette contrainte. La nature domine et elle le montre. Nous devons s’adapter et comme disent les Norvégiens « Il n’y pas de mauvais temps, que des mauvais vêtements » Ce profond respect de la nature se ressent chez eux. Un tel paysage se mérite, la pluie et le vent ne sont qu’accessoires.
Nous roulions doucement jusqu’à notre destination, ne laissant aucun endroit nous échapper. Il y a dans cette région des lieux si isolés qu’ « autarcie » n’est pas un mot étranger. Havoysund en fait parti. Ce petit village de pêcheur est relié par la route que depuis 30 ans et emprisonné des glaces 4 mois de l’année. Peuplé de seulement mille habitants, ce petit bourg vaut le plus grand des détours.
Nous continuions notre périple vers le lieu tant attendu, et après 300 kilomètres et 5 heures de route, nous y étions. Le Nordkapp n’est pas réellement le point le plus septentrionale d’Europe, disons qu’il est le plus accessible, car il est perché sur une majestueuse falaise. Bien que ce site- là soit très agréable (quoique noir de monde l’été) il existe un autre endroit, et non des moindres, le Knivskjellodden.
C’est officiellement le point le plus au nord de l’Europe. Pour s’y rendre, une randonnée de 4-5h aller-retour, où l’on traverse des marécages, des rivières, le tout sur un gigantesque plateau dominant l’horizon.
Par chance, nous avons pu parcourir ce chemin sous un soleil de plomb. Ce jour là, vers 22h, une vieille dame rencontrée dans un bar nous dit que ce temps est rarissime, et qu’il faut absolument partir contempler le soleil de minuit. En moins de 5 minutes, nous étions déjà prêts.
Nous débutions à 22h30 sous ce soleil si unique. Il n’y avait pas de vent et nous étions seuls. Des mois et des mois que nous attendions ce jour, et nous voici, un 15 juin, à 4000 kilomètres de chez nous, en ayant roulé vers le Nord depuis 8 mois, à marcher encore un peu plus vers le Nord, pour admirer cette nature si étonnante. Trois heures après notre départ, nous nous trouvions face à une plage de galets, enclavée entre deux pitons rocheux. Nous étions là, éclairés des lumières du nord, face à la mer, avec à l’ouest le soleil et à l’est, la falaise du Cap Nord. Ce moment magique fut le symbole de cette aventure et demeurera à jamais de nos esprits.
______________________________________________________________________________________________________________________________________________________