Du Niger à Paris
Rencontre avec Aude et axelle, de ombre claire
Photographies par Nina Ducleux
Valentin, Mathieu, Axelle et Aude se sont rencontrés l’année dernière à Paris. Imprégnés de voyages, de belles matières et de savoir-faire et tous ayant en commun un fort engagement éthique, c’est naturellement qu’ils ont eu envie de travailler ensemble. Olow a prêté les inspirations de sa collection d’été aux artisans touaregs, et Ombre Claire a dessiné des motifs pour des vêtements et accessoires.
Ombre Claire, c’est un univers graphique dans lequel se décline une ligne de bijoux au design contemporain. Aude Durou imagine et dessine les modèles qui sont ensuite façonnés par des artisans Touaregs au Niger et au Mali. Entre les divers échanges qui ont ponctués ces derniers mois de collaboration, on a pris le temps de leur poser quelques question pour en savoir plus sur leur univers, leur travail, mais aussi leurs inspirations et aspirations.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Axelle / Aude, c’est la main qui dessine, l’œil affuté qui voit dans toutes les petites choses du quotidien de la poésie. C’est elle, qui sans relâche depuis bientôt 20 ans dessine les bijoux d’Ombre Claire au gré de ses aventures de vie qui l’inspirent autant que la nature qui n’a de cesse de l’émerveiller. La bonne camarade qui rit tout le temps et qui essaye aussi de faire rire les clients. Parfois, ça marche !
Aude / Axelle est la bonne fée d’Ombre Claire, elle est arrivée pour m’aider à structurer, faire en sorte que tout le monde soit bien chez Ombre Claire, que les artisans aient bien leurs commandes, que les clients n'attendent pas trop longtemps. Elle a un peu inventé le concept du coaching avant l’heure. Elle rit encore plus souvent que moi, et surtout ses blagues ont plus de succès que les miennes ! .
Comment le projet Ombre Claire est né ?
Aude / je suis partie au Niger voir des amis après mes études d'arts appliqués, j'avais l'intention de réfléchir à ce que j'allais faire de ma vie, de prendre un peu le temps. Les artisans se sont emparés de mes dessins et ont fait des bijoux. Je suis revenue en France avec ma première collection et Ombre Claire est né.
20 ans plus tard je continue à leur envoyer des dessins et ils continuent à m'envoyer des bijoux... je ne sais parfois plus qui a commencé... c'est une belle rencontre.
Les artisans se sont emparés de mes dessins et ont fait des bijoux. Je suis revenue en France avec ma première collection et Ombre Claire est né.
D'où viennent les inspirations ?
Aude / je m'inspire de ce que je traverse, de ce que je croise, un livre, un voyage, une préoccupation, le travail d'un artiste... Mes collections racontent secrètement mon cheminement intime.
Pourquoi aller vers l’artisanat touareg ? Quel lien avez-vous avec cette culture ? Pourquoi le Niger en particulier ?
Aude / j'ai été élevée dans une famille où le mot "touareg" devait être employé 100 fois par jour, mon père ne lit que des ouvrages sur le Sahara, la maison était bien souvent envahie par une armada de musiciens, de copains de brousse, de familles réfugiées pendant la rébellion. Je pense que leur culture fait entièrement partie de la mienne. Quand je vais au Niger, j’ai l’impression d’aller voir mes cousins.
Je pense que leur culture fait entièrement partie de la mienne. Quand je vais au Niger, j’ai l’impression d’aller voir mes cousins.
Axelle / C’est notre amour du Sahara qui nous a réuni avec Aude. Nous nous sommes rencontrées sous une tente touarègue au bord de la Marne, il y a fort longtemps puis recroisées mille fois, au gré des concerts de Tinariwen ou de conférence sur le harnachement des chameaux. Pour ma part, j’ai fait mes premiers pas au Sahara à l’âge de 17 ans et je suis tombée amoureuse de ce désert et de ses habitants. J’ai poursuivi des études de géographie en me spécialisant sur le Niger. Après plusieurs aventures professionnelles diverses et variées, j’ai retrouvé Aude il y a 11 ans pour poursuivre l’aventure Ombre Claire et ouvrir la boutique atelier dans le 11ème.
Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment se passe le processus de création et les échanges avec les Artisans ?
Aude / Lorsque je dessine les bijoux je pense à la manière dont ils vont devoir les réaliser, j’adapte mon idée à leurs savoir-faire. Et puis ils créent à leur tour, en général je ne reviens pas sur ce qu’ils ont fait de mon idée première, même si parfois le bijou est très différent de mon dessin. J'aime que les collections nous appartiennent à nous tous, pas seulement à moi. Et je leur fait confiance sur le sens de la proportion, sur la technique, donc la plupart du temps je reçois leurs propositions et je n’y touche plus. Les collections Ombre Claire sont un pont entre nous.
Vous parlez d’un projet éthique de bout en bout de la chaîne, cela implique quoi précisément ?
Axelle / L’éthique c’est proposer des bijoux de qualité, durables, réparables fabriqués dans des conditions justes et équitables pour toutes les parties prenantes. C’est avoir des relations saines et respectueuses avec tous ceux avec qui nous entretenons des liens : nos fournisseurs, les artisans Touaregs, nos clients, nos partenaires.
Dès sa création en 2006 Ombre Claire a été fondée sur une charte éthique rédigée avec les artisans Touaregs avec lesquels nous travaillons et qui reprend les engagements de chacun, nos droits et nos devoirs les uns envers les autres.
Parce que nous n’imaginons pas travailler autrement et que c’est une grande liberté que d’interagir avec les autres selon des valeurs auxquelles nous croyons : l’équité, le partage, la bienveillance, le respect des autres et de l’environnement. Parce que nous rêvons d’un monde plus juste, plus équitable qui valorise les liens et, qu’à notre petite échelle, nous essayons de mettre notre pierre à l’édifice.
Quelles sont les matières que vous utilisez dans vos créations ?
Axelle / Nous travaillons essentiellement l’argent massif et le bronze. Notre argent est recyclé, il est issu d’anciens bijoux qui sont fondus pour réutiliser la matière. On obtient à la fin un argent très pur appelé argent 999 qui signifie qu’il est pur à 99,9 %. C’est pour cela qu’il est très clair et très souple car c’est ainsi qu’est l’argent à l’état naturel. Nous aimons l’idée du métal qui bouge, qui vit avec celui qui le porte.
Le bronze est un alliage très solide de cuivre et d’étain. C’est un métal qui s’oxyde davantage mais lorsqu’il s’oxyde, il devient plus jaune et plus mat, ce qui est aussi très joli. Nous aimons mélanger les métaux, c’est un peu aussi notre marque de fabrique !
Vous faites souvent des collaborations, comment vous les choisissez ?
Aude / Toutes les collaborations sont des rencontres. Lorsqu’on rencontre quelqu’un qui a un discours qui nous interpelle, un univers graphique, un savoir-faire que nous aimons, une éthique dont nous nous sentons proches, alors nous avons envie de créer davantage de liens avec cette personne, partager un moment ensemble... la collab' c'est une manière de faire vivre cela.
Vous pouvez nous reparler des pièces imaginées avec OLOW ?
Aude / Olow voyait la vie en “Fire & Joy” cette saison, nous sommes entrées avec bonheur dans leur univers, et nous y avons apporté nos motifs sahariens.
Toutes les collaborations sont des rencontres.
En parlant de Fire & Joy, ces mots évoquent quoi pour vous ?
Aude / Cela me fait rêver à un baptême Payen, où tous les invités danseraient autour d’un feu en invoquant des êtres de la nature, tous habillés de toutes les couleurs, des tambours, des guitares et la nuit devant nous... Vous êtes dispo bientôt ? J’ai un champ à disposition !
Pour célébrer la sortie de la collab le 14 mai, nous organisons un événement, conjointement avec Ombre Claire dans leurs locaux.
L'ensemble des vêtements et bijoux imaginés dans le cadre de cette collaboration seront alors disponible en ligne et dans nos boutiques.
