Piils, la pilule qui fait du bien!
À peine arrivé à Paris me voilà pris d’une nausée indescriptible. Serait-ce l’immensité de la Porte Maillot qui me donne le tournis ? Je sens qu’il faut que je consulte… Le rendez-vous est prit ce sera au cabinet Piils. Pas moins de 3 experts s’affèrent ici tout les jours pour mettre un terme à tous vos maux. Pour ma part je tombe sur Ilan, Docteur lifestyle de l’Ouest parisien. Bilan et Diagnostique…
Piils : Parisian Lifestyle Medecine, alors docteur sommes-nous sur la bonne voix pour soigner l’ouest Parisien en mal d’audace ? Ouvert depuis Janvier comment se passe cette première année ?
Tout ce passe bien. Ça se développe. Ça avance… On a de plus en plus de monde qui s’intéresse à la boutique. On a un vestiaire assez large. On a la chance de mélanger des marques qui sont super street comme Stussy avec des marques qui sont beaucoup plus « Héritage » comme Barbour. Les deux se marient plutôt bien. L’idée c’est de mélanger du traditionnel avec ce qui ce fait aujourd’hui. Les marques comme Olow ou Homecore arrivent à proposer une mode alternative à une personne d’une trentaine d’années qui à forcément des inspirations, une culture, un background street mais qui aujourd’hui est un peu plus mature et souhaite quelque chose d’un peu plus classe. Tout en gardant un côté urbain. Depuis janvier au fur et à mesure notre offre s’étoffe. On a de plus en plus de marques qui veulent travailler avec nous. Cela traduit une certaine reconnaissance et montre en même temps qu’il y a un réel manque dans l’Ouest parisien. Mise à part les Batignolles, si tu les mets à l’Ouest. Tu n’as pas de quartier cool. Je ne pense pas que ce soit une volonté des populations qui y habitent qui sont désintéressé de tout ça. Le problème ici c’est que tout est plus cher. C’est donc plus difficile de s’installer pour les jeunes qui sont le moteur des changements. Aujourd’hui tu es plus serein si tu vas t’installer dans le marais. Mais pour moi l’idée c’était de me mettre dans un endroit ou l’on ne m’attend pas. Dans une galerie commerciale de luxe. Les gens ont plus l’habitude de voir ici des choses traditionnelles, cadrées. On propose une offre qu’on a pas l’habitude de voir dans ce genre de quartier. Et encore moins dans une galerie commerciale. Tout le challenge est là !
Tu as eu la chance d’étudier 2 ans entre les États-Unis et l’Asie. De quelle manière ces pays t’ont ils influencés ?
En Asie j’ai vécu en chine. Et je pense que pour les Etats-Unis comme pour la Chine c’est deux pays qui arrivent à intégrer de nombreuses communautés différentes. Elles sont certes plus ou moins compartimentées mais à la fois y’a un espace spongieux qui absorbe le bien de chacune de ces communautés. Qui est par la suite retransmis dans la création d’univers. Que ce soit dans la mode, dans l’art, la restauration. Tout lieu à une atmosphère différente. Chacun voulant créer son propre univers. Ici en France si il y a un truc qui marche tout le monde va aller dans le même sens et on va se retrouver avec des duplicatas. Ce que je retiens de ces pays c’est qu’ils ne se mettent pas de limites. Tout est possible. Ici on a des normes de tout ! Tout doit être comme ci, comme ça, cadré. Pour ouvrir une boutique dans un centre-ville et faire ce que tu veux à l’intérieur c’est une véritable galère. Que ce soit en terme de décoration, des matériaux utilisés. On te met des bâtons dans les roues dès la création. Dans ces pays, plus tu vas innover, plus tu vas créer quelque chose de nouveau, plus les gens vont être chaud pour te suivre ! Je suis resté 1 ans à Shanghai. J’étais déjà allé plusieurs fois auparavant. Les choses changent du tout au tout. Tu ne reconnais pas la ville. Des quartiers entiers se créent. Leur but c’est de créer du nouveau et d’avancer. Nous j’ai l’impression c’est toujours du réchauffé. Remettre au goût du jour les choses sans vraiment innover à chaque fois ! Aux Etats-Unis leur force c’est d’être toujours les premiers. Dés que tu vas voir un investisseur pour lui proposer un nouveau projet avec quelque chose de plus décalé par rapport à la normale c’est là qu’on va te suivre. Parce que tu as un profil plus intéressant. Il faut une volonté de faire bouger les choses.
On ressent aujourd’hui un réel essor des concepts store, cosy et convivial, c’est quoi ton point de vue la dessus ?
De plus en plus de petit shop indépendants ouvrent. Aujourd’hui une boutique ne peut plus être mono produit. Les gens ont envie de rentrer dans un espace où ils peuvent trouver un vestiaire complet et assez large. Des pièces super street, comme des pièces très créatives. On travaille avec la marque anglaise Tourne de Transmission. Les mecs sont dans un univers à la fois street, gothique. Tout est noir, gris, blanc, c’est très graphique. Et bien, ils ont des pièces qui ne seront pas forcément incompatibles avec un mec qui s’habille en costard toute la semaine ! Tu peux avoir une petite maille à côté d’un sweat, d’une chemise en jean, d’un T-shirt graphique que tu vas garder une saison ou deux parce que le message t’a plu. Avoir un mélange assez éclectique de ce qu’est la mode aujourd’hui. Et tout ça l’accompagner avec une sélection de magazines qui permet de comprendre à nos clients dans quel type d’univers on évolue. Et si tu aimes ce type de lecture tu pourras peut être t’ouvrir à d’autres choses. Beaucoup de gens disent : « c’est joli mais c’est pas pour moi. » Ça veut dire quoi ? En fait les gens ne l’assument pas et ne veulent pas le porter. Mais c’est tout simplement parce qu’ils ont peur du regard de l’autre. Peur que ce soit mal interprété. Et au final il y a des choses qui sortent de l’ordinaire et c’est sûr que si tu le mets en total look tu vas passer pour quelqu’un de perché, trop pointu. Si tu arrives à prendre des pièces à droite, à gauche, que tu mélanges un peu tout, tu vas arriver à une silhouette homogène et assez bien équilibrée.
Avec une main mise sur le marché du textile par les grosses enseignes, quelle est la solution pour résister ?
Le moyen aujourd’hui de se différencier est de proposer une mode alternative.
La force des grandes enseignes aujourd’hui est de produire très rapidement. Tu vas me présenter ta collection pour la saison d’après. Et comme par hasard ils ont les mêmes inspirations et deux semaines après ils l’ont sorti. C’est bien dans un sens parce qu’ils arrivent à démocratiser un certain style et que les gens sont plus sensibilisés. Mais par exemple aujourd’hui le jean brut, il galère. Parce que le jean brut tu le trouves à 29,99euros chez Uniqlo et leur jean, il est beau. Toile japonaise, coupe assez propre. Et ils arrivent à casser le prix. Donc forcément la clientèle de masse. Et même celui qui n’est pas de masse va aller acheter son jean chez Uniqlo. Après est-ce qu’on a tous envie d’avoir le même jean Uniqlo, peut être pas. Mais c’est en majorité à cause de ces grosses machines que les plus petites marques subissent… La solution pour faire front c’est de toujours innover. Rechercher dans chaque marque, chaque produit, une histoire, un univers à raconter. Ici il n’y a pas une marque, un produit, ou il n’ y a pas un petit truc à dire dessus. Que ce soit sur les matières, la fabrication, la coupe, l’histoire de la marque.
Tu souhaitais développer une certaine synergie entre la mode et la musique, notamment avec le site web Larscenic, ou en êtes vous actuellement ?
On a déjà fait une petite mixtape sur Soundcloud en février pour la Saint-Valentin. Et l’idée c’était de faire une petite mixtape autour de chansons qui pourraient être cool et pas cliché pour la Saint-Valentin. En gardant l’esprit de Larscenic. C’est à dire parler d’artistes montants qui viennent de pleins d’univers différents. Larscenic aime tout mélanger que ce soit du jazz, du hip hop, de l’électro, du rock. Ils ont envie de faire quelque chose avec de la vraie musique. Aujourd’hui il y a trop de sons. Beaucoup de pollution auditive. Trop de trucs dégueulasses et commerciaux. Malheureusement je trouve que c’est le rap français qui en pâti le plus. C’est plus l’époque de Solaar ni d’Oxmo. Malheureusement ça vend beaucoup moins qu’un gars comme Kaaris. Pourtant il raconte des choses…Personnellement ça me touche pas… En vérité il raconte rien. Il n y a pas d’histoire. Aux Etats-Unis aussi le rap US ils disent de la merde, mais ça sonne différemment. (Rires). Sinon avec Larscenic y’a des projets à venir mais je ne peux pas en dire davantage pour le moment.
Vous fabriquez constamment du mobilier à partir de matériaux de récupération, parles moi un peu de ces créations?
Du mobilier a été crée par des entreprises professionnelles pour la boutique. Mais derrière, c’est vrai que j’ai tendance à ramasser pas mal de truc qui trainent dans la rue. Je suis en smart mais j’arrive à bourrer ma voiture. Du coup je fais pas mal de récup. De temps en temps des petites brocantes. L’idée c’est de détourner le mobilier. Dans la boutique par exemple, le meuble dans lequel sont les pantalons c’est une armoire en métal qu’on a mis à l’horizontale avec des roulettes. À la base il était tout bleu et on a décidé de le poncer pour lui redonner un aspect métallique. Le meuble de magazines, c’est un truc de transport de verre. Je l’ai raccourci, j’ai monté des étagères, et mis un grillage au milieu. Pareil les tabourets ce sont des tabourets en métaux. On a peint uniquement l’assisse et on a laissé dégouliner la peinture. C’est juste de toute petites idées. On a une baignoire aussi qu’on a transformé en canapé ! Elle n’est pas dans la boutique parce que l’idée c’est que ça tourne. Du coup tu n’as pas tout le temps les mêmes meubles.
Que souhaiterais tu développer de nouveaux avec Piils ?
Ce serait bien de faire des événements en boutique. Après c’est une boutique donc c’est compliqué de le faire. Le plus gros problème aujourd’hui c’est le temps. Il faudrait grossir en effectif pour pouvoir tout gérer. Il s’agit pas de faire les choses à l’arrache. Sinon en projet, pour cet été il va y avoir une deuxième version de Piils qui va ouvrir. Et ça va s’appeler « Petit Piils ». Pour les enfants. Toujours à l’Ouest. Pas loin de chez nous. L’idée c’est de ne pas faire une boutique pour enfant sage. On veut une boutique au contraire avec de petits gosses un peu turbulents, qui bougent partout. Et pareil mélanger de la basket avec des fringues. Avec la même envie que pour l’adulte, se différencier. On va bosser Finger in the nose, Bellerose. On va aussi bosser avec une marque japonaise Arc and Line qui propose des silhouettes de gamins. C’est des mini nous. L’enfant, je trouve ça trop marrant et c’est le futur. Quitte à vouloir éduquer autant commencer au saut du lit. Ça fera surement une génération plus ouverte. Aujourd’hui on te dit que pour avoir un bon job il faut être médecin ou avocat. Tous les métiers qui sont dit artistiques sont des métiers à risque et les parents ont tendances à les déconseiller. Alors qu’un graphiste aujourd’hui peut très bien gagner sa vie. Parce qu’à notre époque le graphisme et l’image on en a besoin.
Tu es passionné de street art, de photographie, et de musique. En ce moment quels sont les artistes qui t’inspirent dans chacune de ces disciplines ?
Tu vas me dire que c’est assez commun mais c’est JR. C’est le gars le plus inspirant du moment. Quand tu penses qu’il a une trentaine d’années. Tout ce qu’il a déjà fait depuis 2006. Il est arrivé à un niveau énorme. Chaque projet est fou. Ce que j’aime beaucoup chez lui c’est qu’il sort complétement des sentiers battus. Il travaille la photo sur des trucs hors du commun. Il va travailler avec le Ballet de New-York ou l’Opéra de Paris. Il va bosser sur un projet avec la cité des Bosquets en région parisienne puis les favelas au Brésil avec l’accent mis sur les femmes. Il s’attaque à tout ! Il travaille en ce moment sur Ellis Island et les premiers immigrés New-Yorkais. Tout le monde veut bosser avec JR. Il donne envie de se bouger. Après en street art, l’idée même du street art c’est dans la rue et tu sais pas forcément qui s’est et c’est ça qui est cool. Tu apprends à les reconnaître au fur et à mesure parce que la patte de l’artiste va être la même. Par exemple SpaceInvaders qui arrive à mettre ses petites mosaïques dans tout le monde entier. Il garde une part de mystère avec des grandes mosaïques que tout le monde voit et des plus petites que peut être une personne sur dix va apercevoir. En musique je trouve que Fakear c’est bien planant…
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Merci à Manu, David, et Ilan.
– P.L –