XYWHY, le syndrome hip-jazz
Ce ne sont pas des physiciens, encore moins des docteurs. Tout aussi bien, leur nom pourrait être le titre d’une étude médicale ou pharmaceutique, utilisé à fortiori par d’incroyables tronches qui aiment s’esquinter l’œil au microscope. Caryotype [n.m] : photographie et ensemble des chromosomes qui caractérisent un individu, son sexe et sa race. De ce mot stérilisé, le groupe parisien XYWHY en ressort plus qu’un enchainement de microscopiques bâtonnets qui désigne, du haut de leur petitesse, la nature de ce qu’on a entre les jambes. Là n’est pas le sujet. XYWHY étire cette nomination génétique dans un contexte contemporain et générationnel : « Les gens avec le caryotype XYY (syndrome de Klinefelter, ndlr) étaient mal compris dans les années 70, jugés d’être une communauté de gens génétiquement violente. Ce qui a influencé pas mal les recherches alors que finalement, il n’y avait aucune anomalie comportementale à signaler. Grosso modo : Quand tu avais le style « XYWHY », t’étais capable de l’extrême ! »
Extrême. Le mot est peut-être mal choisi, ou certainement trop dur pour parler de leur musique. Celle-ci est volontairement forcée, mise à contre-champ dans sa belle et élégante nature. Celle-ci est volontairement forcée. Elle est née d’une liaison bâtarde, chose que Coltrane aurait peut-être qualifier de « chimérique ». Pourtant, au-delà de l’évidence et de la mouvance actuelle qui prône l’original du ‘jamais fait’ au détriment d’une confiance faussée par le confort médiatique, on comprend désormais le « capable de l’extrême ». Ils sont jeunes, ils veulent prendre des risques. Ils mélangent les opposées comme on mélangerait le sucre et le sel, ils se la jouent supra in da mood et racolent comme ils veulent et quand ils veulent sur les marches de la frénésie parisienne. Jalousie oblige, ce cynisme cache au fond un réel plaisir d’en entendre plus.
Deux genres, le jazz et l’hip-hop. D’un côté, quatre amis que tout a réunis, entre amour jazzy et études prolifiques : Olivier à la trompette, Fabien le bassiste, Luc le batteur et Nils qui s’amuse à bidouiller ses pads : « J’ai passé mon enfance à faire des instrus pour des potes qui rappaient. En arrivant sur Paris, j’ai voulu développer ça vers un projet ‘live’ pour lier la dynamique du ‘sampling’ hip-hop avec une dynamique instrumentale, pour éloigner le trame classique du rappeur qui pose son flow sur des beats. Car à la base, c’est un projet live tourné vers l’improvisation. » En suivant cette idée, il tombe sur Zack (alias Theorhetoric), un rappeur américain installé en France depuis 7 ans, « et il s’en suit dans la foulée une date assez importante : la première partie de Soweto Kinch (rappeur et musicien de jazz britannique, ndlr.) au Tamanoir à Gennevilliers. Il nous a fallu 2 semaines et demie pour préparer cette première partie avec nos instruments, les textes de Zack, etc. Passé l’hiver et les préparations de sets, on s’est ensuite lancé dans l’élaboration de l’EP avec les moyens du bord ».
Autoproduit et trituré dans un home studio, inspiré par un gout commun pour l’électronique (The Roots, Flying Lotus), l’EP de XYWHY est un clash pacifiste entre deux cultures finalement pas si éloignées. Faut-il l’entendre pour le croire ? Drapeau blanc en berne, on savoure désormais la victoire des auditeurs, pauvres pantins, qui se délectent encore d’en être les heureux bénéficiaires.
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