ITW – BLAQ, Typographies d’antan
Originaire du Havre et résidant aujourd’hui à Nantes, BLAQ, de son vrai nom Nassim Lahreche n’a jamais été très studieux. Balancé de formation en formation, même lorsqu’il entre en école de graphisme, sa tête est ailleurs… Son dossier n’en reste pas moins le meilleur de toute la section. C’est grâce à l’association événementielle montée par ses cousins qu’il commence réellement à bosser en faisant ici et là des flyers, affiches et logos pour le monde de la musique. Fan du Chicago des années 1930, son style s’inspire de la typographie des enseignes de merceries et d’épiceries d’antan.
En 2014, il réalise pour nous une typographie « Olow » éphémère à l’aide de curcuma. Aujourd’hui auto-entrepreneur, BLAQ a des projets plein la tête. Il prépare actuellement une exposition à Angers et aimerait monter son propre collectif nantais réunissant rappeurs, DJs, producteurs, graphistes, photographes et vidéastes afin de construire des albums de A à Z de manière indépendante. Plus tard, il se verrait bien travailler dans un salon de tatouage.
Salut Blaq !
On sait que tu as eu un parcours scolaire atypique. Peux-tu nous en dire un peu plus ?
À la base, j’étais parti pour faire un bac STI. Étant donné que je ne voulais pas faire ça du tout, j’étais en échec scolaire. J’ai fait STG option marketing mais ce n’était pas du tout ce que j’aimais non plus. J’ai donc raté mon bac. J’ai fini dans une formation d’assistant import-export bilingue parce que j’avais un bon niveau en anglais. Je passais mes journées sur Facebook et MySpace donc j’ai raté cette formation aussi. J’ai profité que mes cousins montent une association événementielle où ils organisaient des battles de breakdance pour m’incruster dedans. Comme on avait besoin d’un logo, on a été voir un graphiste au Havre. J’ai vu qu’il travaillait sur Illustrator, le soir-même j’ai téléchargé le logiciel et c’est moi qui ai fini par faire le logo. Ça a commencé comme ça et ensuite c’est moi qui faisais les affiches, les flyers, etc.
J’imagine que les commandes se sont enchaînées assez vite ensuite.
Oui, j’ai continué et de plus en plus de gens me demandaient de faire des trucs pour eux. Je suis rentré chez The Chemistry Magazine où je tenais une rubrique sur le graphisme et ce qu’il fallait suivre dans le domaine. Je suis ensuite allé chez Open Minded pour écrire quelques articles puis j’ai suivi une formation en graphisme et mise en page. Je me suis un peu ennuyé aussi ; je passais mes journées à jouer à LEGO Star Wars pendant que les autres faisaient leurs exercices. En fin de compte, j’ai eu le meilleur dossier de la section. Ça fait maintenant 1 an et demi que je suis auto-entrepreneur. Ça monte petit à petit.
On te sait inspiré par toute l’ambiance de la première moitié du XXè siècle. Que représentent ces années pour toi ?
Je pense qu’il y avait un plus gros travail sur la typographie à cette époque-là car c’était fait à la main. Il y avait un savoir-faire et une dextérité. Et puis c’est tout simplement l’ambiance des petites enseignes de mercerie et d’épicerie qui me plaît beaucoup. Étant un gros fan d’Al Capone, le Chicago des années 1930 c’est mon truc.
Je vois que tu as des tatouages. C’est toi qui les as dessiné ?
Je n’ai dessiné qu’un de mes tatouages, une petite dent. Sinon, ce sont mes idées mais pas mes dessins. Le tatouage, c’est mon projet de fin de carrière. J’attends d’avoir du vécu et un style.
Tu travailles beaucoup sur la typographie. Que racontent les formes des lettres pour toi ?
À la base, je n’ai pas un niveau énorme en dessin et j’ai toujours trouvé qu’il y avait une approche beaucoup plus simple avec la typographie. C’est aussi la perfection, on ne peut pas faire n’importe quoi avec les lettres.
Justement, tu avais fait une typo’ avec du curcuma pour Olow l’an dernier. C’est plutôt atypique. Comment en es-tu arrivé à cette idée ?
En fait, Olow avait organisé un petit concours où il fallait écrire « Olow » avec ce qu’on voulait pour gagner un tee-shirt. Je l’avais réalisé avec du sel et Valentin m’avait contacté en me disant qu’il avait beaucoup aimé mon idée. En allant récupérer mon tee-shirt, on est parti sur l’idée de le faire en farine mais ça faisait un peu trop cocaïne donc on a cherché quelque chose de plus coloré. Ce qui ressortait le mieux était le curcuma.
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Ce projet aromatisé a inspiré le logo du tee-shirt TURTLE qu’on retrouve dans notre collection Fall/Winter « Baie des fumées ». Cette petite tortue a accompagné le projet de A à Z ; elle est sur les photos et c’est même l’actrice de la vidéo de notre pote Julien Léger. Est-ce que tu peux nous expliquer ce qu’elle représente ?
C’est un peu du hasard. Lorsqu’on est allé tourné la vidéo, la personne qui nous avait prêté sa maison nous avait prévenu qu’il y avait une petite tortue. On s’est dit qu’il fallait la foutre dans la vidéo et c’est devenu la star du truc. On a mis des heures à la trouver. Je trouvais sympa l’idée qu’elle détruise le logo à la fin pour montrer que c’était éphémère.
Quelle épice décrirait le mieux ton caractère ?
Le cumin. J’en mets partout : dans les pâtes, le riz, les haricots. Il est doux mais on sent qu’il est là. Il s’impose.
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Tu as fait pas mal de projets en rapport avec la musique que ce soit pour des soirées, des festivals, des radios ou des musiciens. Qu’est-ce qui t’intéresses autant dans cet univers ?
Vu que j’organisais des soirées avec l’asso’ de mes cousins, c’est moi qui gérais tout niveau communication et contacts. Je suis devenu pote avec la plupart des gens et c’est comme ça que ça s’est fait. La plupart de mes clients organisent des soirées ou sont DJs. Mon style colle plus à tout ce qui est techno/house car c’est un style qui laisse carte blanche. Mais j’écoute de tout : rap français, métal japonais, reggae… Sauf le zouk et ce qui passe sur les grandes radios.
Peux-tu nous parler d’une collaboration qui t’aurais particulièrement marqué dans ce domaine ?
J’avais fait le logo d’un de mes potes Daze et on s’est dit que ça serait mortel si on le transposait en 3D. Au culot, j’ai contacté un mec pour qui j’avais fait un article quand j’étais à The Chemistry Magazine et je lui ai proposé une collaboration pour la cover de Daze. J’ai aussi fait un truc pour un mec de la région qui organisait une soirée avec un autre collectif. Ils voulaient leur propre tee-shirt car l’autre collectif ramenait son visuel ; c’était un peu la battle graphique.
Si tu devais faire une collaboration avec l’artiste de tes rêves, ce serait qui ?
Salvador Dalí , même si je ne sais pas peindre. Ou Tupac. Et dans les vivants, Lapti.
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Plus on voit tes visuels, plus on se rend compte de l’importance de l’harmonie des couleurs. Comment réfléchis-tu leur association ?
On m’a appris à ne pas associer plus de 3 couleurs ensemble pour un logo. Je ne suis pas très chaud pour mélanger 50 couleurs. J’aime bien le noir. C’est pour ça que je m’appelle Blaq d’ailleurs. À la base je voulais que ce soit « Black Flag » avec des « v » à la place des « a » mais c’était trop compliqué. « Black » tout seul était trop neutre du coup j’ai choisi « Blaq ». Mais j’aurais bien aimé m’appeler Stafardine aussi.
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Est-ce que tu penses à faire une expo’ de tes créations dans un futur plus ou moins proche ?
Justement oui. On m’a proposé une expo’ à Angers l’année prochaine, je ne sais pas encore la date mais ce sera un gros truc. J’ai aussi envie de monter un collectif avec des rappeurs, producteurs, DJ, photographes, graphistes… Ce serait une grosse structure où on s’entraide tous ; si quelqu’un sort un EP on l’aide à faire ses shootings, ses clips, sa prod’, etc. J’ai commencé à contacter des gens sur Nantes. Là, je commence à écrire des textes de rap, je vais apprendre à mixer et comme ça on pourra organiser des soirées sur Nantes. Comme ça, je serai artiste à temps complet et je saurai tout faire. Y’a plus qu’à tout faire !
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