Canopée en noir & blanc
Rencontre avec l'artiste Twotma
Photographies par Nina Ducleux
Twotma est l’une des artistes qui nous a le plus marquée sur ces 2 dernières collections. Depuis mars dernier, on a d’ailleurs multiplié les moments communs, entre une exposition dans notre boutique/bureau de Paris et une grande campagne d’affichage à Nantes.
On a profité que Nina, notre photographe, passe à son atelier pour saisir quelques clichés d’elle dans son environnement, et échanger quelques mots, sur la collection, son travail… De sa vie citadine à ses escapades en forêt, elle nous convie une fois de plus dans son univers poétique, impulsif, le tout en noir et blanc.
Peux-tu te (re)présenter en quelques mots ?
Je suis Twotma, je dessine et je peins en noir et blanc à l'encre de Chine. Il y a quelques années, j'ai fait connaître mon travail à Lisbonne en collant mes dessins dans la rue. Aujourd'hui, je suis installée à Paris.
Je crois que mon influence principale, c'est mon envie de fuite : dessiner, c'est comme une fuite en avant, comme pour chercher à me "désinfluencer" et partir encore ailleurs, si c'est possible.
D’où te vient ton style ? Quelles sont tes influences principales ?
J'imagine que la simplicité de mon trait a quelque chose à voir avec mon besoin de spontanéité, mon impatience, comme une envie de "ranger" le chaos de mes pensées et le réduire à un trait net. La radicalité du noir et blanc a pour moi quelque chose de très apaisant. Les influences sont aussi nombreuses que floues, logées quelque part entre tout ce que j'ai pu vivre depuis ma naissance. Je pourrais dire "Matisse, Picasso, Gauguin, Chagall", parce que ce sont les peintres qui m'ont le plus touchée, mais ce ne serait pas vraiment vrai.
Je crois que les influences nous échappent, c'est un joyeux bazar flottant dans notre inconscient, les expériences, les rencontres, les émotions du passé mêlées à celles du présent, et puis ce qu'on en fait face au papier. Je crois que mon influence principale, c'est mon envie de fuite : dessiner, c'est comme une fuite en avant, comme pour chercher à me "désinfluencer" et partir encore ailleurs, si c'est possible.
C’est assez régulier qu’au détour de certaines rue on puisse tomber par hasard sur une de tes affiches, est-ce que tu choisis les lieux où tu affiches à l’avance ? Où est-ce au hasard ?
À Lisbonne, oui, mes dessins ont, à une période, vraiment envahi la ville - et aujourd'hui encore j'aime y laisser ma trace quand je suis de passage. C'est une ville qui me donne envie de jouer, et c'est toujours un plaisir quand les gens reconnaissent mon travail parce qu'ils l'ont aperçu au détour d'une rue au Portugal. Il n'y a rien de prémédité dans ce que je fais - si vous voyez un dessin, c'est parce qu'un jour j'étais de bonne humeur et sur un coup de tête je suis sortie pour vous le dire. Préméditer serait comme un mensonge pour moi : le dessin ne serait plus la trace - idiote peut-être, mais joyeuse et authentique - d'un désir, ce serait un calcul. Le dessin se serait déplacé du ventre vers la tête, et dans ce cas, je ne sais pas. Ce n'est plus vraiment moi.
Ton lieu de prédilection pour tes collages, c’est la ville, mais en quoi la nature a (ou aurait) un impact sur ton travail ?
La ville est inspirante en ce qu'elle a de chaotique, de bruyant, d'absurde et désordonné, elle est inspirante parce qu'elle est vivante, et mes dessins puisent leurs histoires des scénarios qu'elle met sous mon nez chaque jour. Mais pour pouvoir rester réceptive à son spectacle, c'est pareil pour tout le monde je crois, il faut aller prendre l'air ! Ma technique c'est les sorties à vélo régulières dans la campagne autour de Paris, et puis dès que je peux, la montagne. Pour être honnête, j'attends ce moment toute l'année : chaque été, les deux semaines de randonnée. C'est une respiration indispensable à mon travail, et plus généralement, à mon bien-être et à ma santé.
La collection de cet hiver a pour thématique la forêt, qu’est-ce que ça évoque pour toi ?
La forêt évoque pour moi le passage à l'ombre et au frais lors des randonnées en montagne, après des heures de marche en altitude sous le soleil. C'est un lieu où l'on entre étourdi d'effort et de chaleur, les yeux mettent quelques minutes à s'habituer à son obscurité. La forêt c'est un vrai bonheur pour le randonneur.