Cloud Boat, nuages électrostatiques
Perché sur sa bute de béton et de pelouse verte, St Pancras Old Church est l’église musicale la plus petite de Londres. A côté de l’Union Chapel, celle-ci est un Polly Pocket. Le soir de ma première venue, devant l’édifice, je me suis vu endimancher pour une messe hebdomadaire. Et bien non. Les concerts se font aussi dans les églises. A l’intérieur, Cloud Boat préparait son office sonore et j’attendais en trépignant d’impatience que les portes s’ouvrent enfin. À ce moment là, je ne réalisais pas encore que j’allais assister au plus beau sermon de ma vie. Entre un mioche qui braille pour un peu d’eau sur le front, des beaufs qui s’unissent collé-serré et un homme qui déblatère sur le pourquoi du comment, je préfère encore le souvenir d’un groupe qui utilise l’édifice pour ce qui l’est : un lieu de partage – et de pure folie.
Adolescents, Tom Clarke et Sam Ricketts ont joué dans des groupes de metal et de post-rock avant de se tourner vers la production. Pendant les deux étudiaient dans des universités séparées, ils furent tout deux attirés par l’électro, en particulier Ricketts qui trainait déjà dans les clubs underground de la capitale, comme le FWD>> et le DMZ, connu pour leur dubstep, drum’n’bass, grime et autres plaisirs tachycardiques. Une fois leurs études terminées, les deux amis ont travaillé sur de nouvelles inspirations. Cloud Boat sort des nuages en 2011 chez le label réactivé R&S et l’incroyable « Lions On The Beach » fait son apparition en offrant une version hybride de dubstep et de folk mélancolique, quelque part entre Hood et Burial. Il s’en suit alors, après quelques remixes, leur premier album « Book Of Hours », myriade de titres épurés et ultra-romantiques incluant le poignant « Dréan » et le magnétique « Youthern ».
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En 2014, sous la poupe renversante de leur première pépite, Cloud Boat revient avec « Model of You », un second album marqué par une évolution radicale de leur musique. Leur brume dramatique s’est dissipé vers quelque chose plus riche, aventureux et résolument plus gai. L’émotion éthérée du début s’estompe au détriment d’un rythme plus fort et soutenu, amené par une pop transie et hypnotique, comme le montre les titres « Hideaway » et « Carmine » de l’album. L’homme en charge d’aider Cloud Boat dans sa transformation est le producteur anglais Andy Savours, qui a également travaillé avec My Bloody Valentine, The Horrors et les célèbres rêveurs islandais de Sigur Rós. Le résultat est là, aiguisé, propre et certainement indélébile. A tribord toute, le bateau nuageux n’est pas prêt de jeter l’ancre.
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