De la céramique recyclée au design de mobilier
Échange avec Camille et marion
d'atelier camion
C’est dans leur atelier situé au nord de Nantes, que nous avons pu rencontrer Camille et Marion. Normandes d’origine, les deux cousines ont travaillé une dizaine d’années dans la communication et le branding digital sur la capitale. C’est ensemble qu’elles ont décidé de tout quitter afin de concrétiser leur projet de réorientation vers un métier manuel, là où la création ne s’arrête pas devant un écran. Elles se sont installées sur Nantes et ont monté l’Atelier Camion. C’est en collaboration avec l’Atelier Clac, qu’elles ont fabriqué un meuble pour notre nouvelle boutique Olow. Durant l’aménagement, nous avons pris le temps d’échanger sur leur parcours et le milieu de l’artisanat.
Pouvez-vous vous présenter en quelques
mots ? Pourquoi Atelier Camion ?
Atelier Camion est la contraction de nos deux prénoms, Camille et Marion. Nous sommes cousines et nous vivons à Nantes depuis environ 2 ans. Marion est arrivée en première et j’ai suivi 6 mois après.
L’intention de Camion est de créer des meubles carrelés et colorés à partir de chutes ou de réemploi de carreaux de céramique récupérés dans nos régions.
"L’intention de Camion est de créer des meubles carrelés et colorés à partir de chutes ou de réemploi de carreaux de céramique récupérés dans nos régions."
Comment l'aventure de l'Atelier Camion
a-t-elle-commencé ? Quel est votre parcours ?
Nous avions à la fois envie de travailler ensemble mais aussi de de se mettre à des activités plus artisanales, travailler avec nos mains. Donc on a pas mal discuté et un jour on s’est dit « tiens on pourrait peut-être faire de la mosaïque » puis on s’est rapidement tournées vers la céramique. Comme on travaillait dans des métiers liés à l’image, on avait déjà une certaine sensibilité et créativité dans nos activités précédentes. Mais cela commençait et s’arrêtait derrière nos écrans.
J’étais en communication interne, j’intervenais également sur la partie événementielle pour des entreprises. Marion travaillait dans le branding, la création de contenus et la direction artistique. Nous avons exercé ces métiers durant une petite dizaine d’années avant de vouloir s’orienter dans un métier plus artisanal et plus concret
À quel moment l'aventure a-t-elle officiellement commencé ?
C’est en juin 2021, autour d’un café que l’idée est née. Suite à cette discussion, en septembre, on a décidé d’enclencher le projet. Nous nous sommes installées dans notre atelier en novembre 2021. C’était une grande étape pour nous et en même temps elle était indispensable si on voulait développer notre activité. Tout artisan a besoin d’un atelier pour essayer des choses, stocker, c’est notre lieu d’expression finalement. On a pris le temps de tester, fabriquer, réaliser le premier prototype, durant quelques mois. Et en mars 2022, on a lancé le e-shop avec une première collection de pièces, c’est à ce moment-là que le projet s’est officiellement lancé.
Vous avez toujours aimé fabriquer ou c'était nouveau pour vous ?
Nous sommes issues d’une famille très manuelle, depuis petite nos mains nous sont très utiles. Camille a fait de la danse et créer des illustrations, moi j’ai fait de la musique et je réalise des collages. Je pense que l’on baigne dans un univers créatif assez global, cela nous inspire quotidiennement. Lorsque l’on a commencé à toucher à la céramique, c’était pour nous une nouvelle activité créative que l’on pouvait pratiquer ensemble. Au départ c’était un hobby à temps partiel, puis on a rapidement décidé de s’y mettre à 100%.
Est-ce que vous pensez qu'on a trop dénigré les métiers manuels ? Y a-t-il une revalorisation de ces métiers aujourd'hui ?
Je pense que c’est encore compliqué de les valoriser pleinement, mais on sent que cette dynamique est en train de s’étendre et c’est assez positif. En arrivant sur Nantes on a trouvé que la ville était assez propice à la création et à l’artisanat. Très rapidement on a pu se mettre en lien avec d’autres artisans, en une année d’activité on a réalisé plusieurs collaborations. Cette énergie collective est très plaisante et rassurante. Mais on a aussi constaté que dans l’artisanat, ce n’est pas facile de se faire identifier, d’obtenir des aides et de vivre pleinement de cette activité. C’est un métier assez risqué car pour le moment on a pas mal de projets qui rentrent, mais on ne sait pas de quoi est fait l’avenir. C’est un pari quotidien de faire un métier passion.
Comment vous êtes-vous formées ?
On a commencé en regardant des vidéos. Puis des carreleurs sont venus à l’atelier pour nous aider à appréhender le métier, nous conseiller lors de certains projets. Ensuite on a surtout réalisé plein de tests, on a essayé des outils numériques pour tout ce qui est conception. Concernant la partie fabrication, on a tenté de travailler avec différentes marques de matériaux Certains n’étaient pas du tout viables, il y a des marques avec lesquelles ça ne fonctionnait pas du tout. On a pris le temps pendant quelques mois de nous former pour pouvoir exercer dans les meilleures conditions. Ce qui est aussi fascinant dans ce métier, c’est qu’il n’y a pas un jour où tu n’apprends pas quelque chose. Tu rencontres quotidiennement des problématiques que tu n’avais jamais eues avant, au début tu te demandes comment tu vas réussir à gérer, mais heureusement il y a toujours des solutions.
Vous fabriquez vos meubles avec de la céramique recyclée, c’était quelque chose qui vous tenait à cœur de faire de la récup ?
Au tout début on a avait pensé à acheter de la céramique, mais on a constaté que c'était dommage de faire fabriquer alors qu'il y avait déjà une tonne de carreaux en circulation. Après avoir identifié les gisements, on a pu développer notre réseau de carreleurs, qu’on sollicite régulièrement. Lorsqu’un client a un besoin spécifique, on se met en quête, c’est du sourcing au quotidien. Puis les carreleurs s’y retrouvent aussi, car même si on ne prend pas l’entièreté de leurs chutes, on minimise leurs coûts en déchetterie. En plus de la céramique, on récupère du bois. Toute une série de nos pièces a été faite sur un parquet d’un stand automobile qu’on a récupéré auprès d’une boîte d’évènementiel. C’était des m2 et des m2 qui allaient partir à la benne juste après le salon. Dans la grande distribution, on a pu récupérer aussi des sacs percés de joint et de colle à moindre coût. On essaye au maximum de revaloriser tous ces matériaux et d’être vertueuses dans la conception de nos pièces.
Pour Olow vous avez travaillé avec l’Atelier Clac, comment s’est lancé le projet ?
On avait réalisé une exposition dans un Café galerie de Nantes, Julien de l’Atelier Clac est venu à l’inauguration et c’est en discutant qu’on a évoqué cette envie de travailler ensemble. Par le passé nous avions déjà réalisé des collaborations avec l’Atelier Mains libres, des menuisiers et métalliers travaillant dans les locaux de “Make Ici”. C’est d’ailleurs dans leurs bureaux partagés que nous avions eu l’occasion de rencontrer l’Atelier Clac. Avec Mains libres on avait réalisé une collection de 4 pièces, associant 3 matériaux : le bois, le métal et la céramique.
"C’est toujours très intéressant de co-construire des meubles, challenger les idées de tout le monde afin d’en tirer une pièce commune."
C’est toujours très intéressant de co-construire des meubles, challenger les idées de tout le monde afin d’en tirer une pièce commune. L’une de ces pièces est actuellement en exposition chez Maison Contemporain dans le 3e arrondissement à Paris
Vous avez des projets à venir dont vous pouvez nous parler ?
Nous travaillons sur deux gros projets pour des particuliers. Un bureau console d’une grande taille, c’est la plus grande pièce qu’on ait faite, pour des particuliers nantais. On a aussi un projet de table basse, un gros bloc massif qui va nous demander beaucoup de découpe, pour des particuliers aussi. Et peut-être l’une de nos pièces phares, la bibliothèque qu’on avait réalisée en collaboration avec Mains libres. Et enfin, côté B2B, on ne peut pas en dire beaucoup mais c’est un projet d’aménagement de boutique à Paris, on croise les doigts.
La musique est souvent un élément central dans l’inspiration et la créativité. Est-ce qu’il y a un groupe, style musical, qui revient quand vous êtes en train de fabriquer vos meubles ?
Ça dépend des humeurs, parfois ce sont des podcasts, de la radio et d’autres fois du jazz, hip hop, post punk, etc.... Cela dépend des phases du projet, on peut avoir des moments de grande concentration et d’autres où l’on peut se permettre de danser sur du Mylène Farmer. Après concernant les émissions audio, on écoute le podcast “Génération XX”, “Les Pieds sur Terre” de France Culture. Mais généralement vu qu’on a les mains dans le cambouis, on va écouter France Inter et laisser défiler toutes les émissions.
