Elisa Routa : rencontre avec une rêveuse invétérée
Le temps d’un après-midi, nous nous sommes posés pour discuter avec Elisa Routa. C’est à Anglet, dans le sud-ouest de la France, que vit cette journaliste férue d’écriture. À 18 ans, elle découvre le surf pour la première fois à Hendaye, et son attirance pour ce sport l’amène à écrire pour plusieurs magazines de surf comme Désillusion, Surf Session ou encore Huck Magazine. Elle possède une plume délicieuse, qu’on se plait à découvrir au travers de ses poèmes et de ses histoires. Passionnée de photographie argentique, elle capture les instants de sa vie pour pouvoir illustrer ses textes et leur donner un sens. Selon elle, la photographie est surtout « un moyen d’illustrer les mots qui sortent de sa tête » plus que le véritable plaisir de prendre des photos. Rêveuse invétérée, elle nous parle de ses voyages, de son état d’esprit et de ses projets futurs. Petit bonus, Elisa nous fait découvrir quelques clichés de son road trip aux Etats-Unis en décembre dernier…
Salut Elisa ! Est-ce que tu peux te présenter, nous parler un peu de ton parcours ?
J’ai 30 ans, et j’assume pas trop, mais bon c’est pas grave on dirait que j’en fais 20 donc ça m’arrange. Je suis journaliste freelance depuis 2008 et j’habite Anglet. Je fais aussi des photos argentiques. Je bosse pour plusieurs magazines orientés surf. Depuis deux ans environ, j’essaie de m’ouvrir à d’autres publications comme le voyage et la musique. Avant tout ça, je faisais des études à Toulouse, j’ai fait une licence d’anglais. Ensuite, je suis partie en Angleterre, j’ai étudié à l’université de Reading. C’était une licence en Arts et Humanité, autant te dire que j’étais en mode peace and love avec des fleurs dans les cheveux. Ensuite, je suis partie à Londres pour faire une école de journalisme. Je suis ensuite rentrée, j’avais besoin de soleil parce que j’avais la peau aussi livide qu’une vitre pas teintée, donc je suis partie en Andalousie, en Espagne pour prendre des couleurs. Je bossais comme fille au paire. Je suis ensuite rentrée en France où j’ai commencé à travailler pour Radio France. J’ai donc fait de la radio pendant un an et demi à Mont de Marsan dans les Landes. Jusqu’au jour où j’ai dû faire un choix : me projeter dans une carrière de reporter chez Radio France au niveau national ou alors me consacrer pleinement à l’écriture. J’ai choisi de me lancer dans le grand bain de l’indépendance. J’ai donc déménagé à Biarritz pour être plus près du surf et des publications pour lesquelles je bossais déjà. Et là c’était parti !
Comment est-ce que tu as découvert le surf ?
J’ai découvert le surf à Hendaye. A l’époque, j’étais saisonnière chez Tribord, je vivais sur le voilier de ma mère au port de plaisance juste à côté de celui de mon papi, le plus beau navigateur que le monde ait connu ! Je viens d’une famille de navigateurs où l’océan tient une grande place. À cette époque, on avait trois bateaux sur le même ponton, comme un genre de famille de mafieux avec des bouées en guise de flingues. J’étais vendeuse au rayon plongée et surf. C’était génial. C’est finalement comme ça que j’ai découvert le surf, grâce à l’océan. J’avais 18 ans. Assez tard pour quelqu’un qui vient des Landes. Je faisais du foot avant, j’en ai fait pendant presque 10 ans! Je suis toujours une footeuse dans l’âme. (rires)
Tu as fait plusieurs expositions en France, en Allemagne, en Espagne… La dernière en date c’était au SURFCITY Festival de Barcelone au mois de mars. Est-ce que tu peux nous parler un peu de cette expo ?
En fait, avant de lancer le festival, ils ont fait trois éditions de SURFCITY Exhibition. La première s’est tenue à Barcelone, la deuxième à Bilbao et la troisième à Palma de Majorque. Et pour l’édition du festival, ils ont investi les lieux dans une vieille cathédrale gothique, c’était assez impressionnant. Ils m’ont invitée à bosser en tant que photographe de l’événement. Il y avait une belle atmosphère, une belle ambiance et beaucoup d’humilité. C’était assez unique. À Barcelone, le surf, c’est pas vraiment le sport national… Il y a plus de maillots de Léo Messi que de maillots de bains en néoprène. Mais il y a tout de même une culture surf et des mecs qui surfent comme Marc Conca, l’organisateur de l’event. Il y avait Kai Neville et Brendon Gibbens, les deux starlettes du festival. Il y a eu la projection de leur dernier film « Cluster », qui est une perle. Je suis assez critique envers les films de surf mais là, c’était vraiment canon. Beaucoup de boulot. Pour la petite anecdote, le dimanche matin je me suis levée pour prendre mon café dans l’appartement dans lequel on logeait, et je vois un mec qui sort de la salle de bain, serviette nouée à la taille, torse nu, bronzé de dingue, les cheveux gominés en arrière. Il s’approche de moi et me dit « Hey, I’m Kai by the way ». Et c’était Kai Neville.
À l’heure du numérique tu réalises pas mal de tes photographies en argentiques. Pour quelles raisons ?
La question ne s’est pas vraiment posée, j’ai toujours fait que ça. Le premier souvenir que j’ai, c’est lorsque j’étais à Londres, j’avais mon petit appareil jetable et j’ai commencé à faire des photos pour ramener des souvenirs à ma mère et à mon frère. Pour leur raconter un peu ma vie là-bas, parce que j’ai une mémoire de poisson rouge et que je ne me rappelle de rien. C’était plus facile pour moi de prendre des photos des choses que je vivais que de noter sur un petit post-it à chaque fois que je vivais un truc cool. L’argentique est parti de là. Aujourd’hui, c’est plus un moyen pour moi d’illustrer les mots qui sortent de ma tête que le plaisir de prendre des photos.
Récemment tu as fait un road trip aux Etats-Unis. Est-ce que tu peux nous raconter un peu ce que tu as vécu ?
J’avais fait un trip en solo, sac à dos et chaussures vissés aux chevilles il y a quatre ans. J’avais fait le tour de l’Est du Canada (Québec et Ontario) en coachsurfing. Ensuite je suis repartie il y a deux ans. Là, c’était mon premier vrai « road trip » entre potes aux US. On est parti de Chicago à Los Angeles avec deux potes à moi. À la base, on n’avait que des skates et l’idée c’était de suivre la Route 66 d’une autre manière qu’avec des bécanes, qui est le moyen le plus connu de faire cette route. On a quand même loué une voiture mais on a fait plus de 4 000 miles comme ça, à pas trop savoir où dormir le soir. L’histoire de la Route 66, elle est dingo. Au fil du temps, on se rend compte que c’est vraiment une seule et même famille. Le mec perché dans son Missouri natal va connaître l’autre mec qui vit dans l’Arizona à deux milles bornes de lui juste parce qu’ils ont leur maison qui borde la Route 66. C’était un sentiment assez unique. Et l’année dernière, on a fait la côte ouest. On est parties de Seattle jusqu’à Los Angeles en passant par Portland et San Francisco, en longeant la Highway 1. C’était un trip assez long, 5 000 miles, à la fois angoissant, surprenant et merveilleux.
Pourquoi avoir choisi cette destination ?
On s’est découvert une passion pour l’Oregon un peu grâce à Instagram. On traînait sans arrêt sur les hashtags #pacificnorthwest et #traveloregon. C’est vraiment une région du monde où tu peux vivre toute une vie sans te lasser du paysage. Tout y est réuni: le désert, les lacs, l’océan, les étendues arides et en même temps les forêts verdoyantes. C’est assez époustouflant. Pour l’anecdote, on s’est retrouvées dans des endroits assez reculés comme le Alvord Desert. Un désert où il n’y a absolument rien autour à au moins trois heures de route. On s’est retrouvées coincées là en voiture en fin de journée, sans station service à l’horizon ni réseau téléphonique, pas même en cas d’urgence, au beau milieu d’une réserve d’antilopes. Toutes les peurs que j’avais eues jusqu’ici étaient dérisoires comparées à cet instant précis. Mais on était aussi venues chercher ça dans le voyage, cet inconnu parfois risqué.
Lors de ton vernissage à Bordeaux au magasin Kulte, tu as chanté avec ton frère. Est-ce qu’il t’arrives souvent de faire des concerts avec un membre de ta famille ou est-ce que c’était anecdotique ?
Avec mon frère, on est très fusionnels. On se rejoint sur énormément de points et notamment sur la musique. On partage un peu le même cerveau et les mêmes émotions. On a commencé à chanter un peu par hasard et nos potes ont kiffé nos voix. Le fait de chanter ensemble.. ça s’accordait bien selon eux. Généralement, je gribouille des paroles et lui il tente un truc à la guitare et puis ça se fait comme ça. C’est assez rigolo parce qu’on nous demande parfois si on joue en public mais on est littéralement tétanisés par la peur et la timidité donc c’est quelque chose qui est destiné à rester entre nous je crois ! À Bordeaux, c’était la deuxième fois qu’on chantait en public. C’était aussi chouette que flippant !
Ça fait pas mal de projets qu’on a fait ensemble. Des t-shirts en collaboration jusqu’à l’expo Planchettes. Qu’est-ce qui t’a donné envie de travailler avec OLOW ?
C’est une marque qui m’a de suite plu, avec deux mecs passionnés par ce qu’ils font. Vous faites les choses sans prétention, juste par passion. Il y a quelques années, Olow avait déjà ce côté artistique, sans avoir toute l’image que ça a aujourd’hui mais il avait quelque chose de particulier. Je trouvais que c’était une marque qui sortait du lot comparée aux autres. Il y avait une vraie identité et un intérêt authentique et sincère pour l’art en général et le travail des artistes.
Tu as participé à l’expo Planchettes il y a quelques temps, est-ce qu’il y a une planchette en particulier qui t’a marquée ?
Il y avait « Tout est bon dans l’cochon » qui m’avait fait marrer ! Celle de Marynn était jolie aussi, j’aime bien ce qu’elle fait.
Es-ce que tu as des projets pour les mois à venir ?
Oui, ça bouge beaucoup en ce moment ! Je suis vraisemblablement à un carrefour de ma vie, donc c’est assez excitant. J’ai été contactée il y a quelques temps pour bosser en tant que community reporter pour une grosse boite. Ça va être un changement de vie total, mais j’ai vraiment hâte de commencer. J’ai aussi récemment rejoint le team de Panthalassa pour lequel je bosse en tant que rédactrice. C’est une compagnie de production tournée vers l’Océan donc je suis comblée ! Faire des recherches sur tout ce qui touche l’Océan et écrire sur l’élément qui a régi toute ma vie, je pouvais pas rêver mieux. C’est un clin d’oeil à mon grand-père qui est parti il y a un mois.
Si jamais on devait passer quelques jours dans le pays Basque quels endroits tu nous conseillerais ?
Allez surfer ! Tu piques la planche d’un pote et puis tu vas surfer à Hendaye pour commencer, loin de la foule Biarrote. En sortant de l’eau, tu files à Biarritz, au petit port de pêcheurs et tu vas manger du poisson frais à la Crampotte. Après ça, tu files sur Guéthary et tu vas boire des sangrias à l’Hétéroclito, certainement le spot le plus cool de la côte. Pour finir ta folle nuit, je te conseille un bon vieux Petit Bayonne, tu vas boire des coups au Xapatan où tu finiras bilingue en Basque avant 4h du mat.
Si tu devais partir avec Olow en voyage, où est-ce que ce serait ?
Je vois bien un pays du nord. J’ai l’Islande en tête.
Merci à Elisa.
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Crédit photo : Elisa Routa
– L.K –