EVENT : La Mauvaise Réputation par C215
À la base considéré comme un art marginal, le street-art a fait son petit bout de chemin et commence à emprunter les mêmes chemins que l’art contemporain. Initié par Banksy, le marché de l’art urbain s’envole et prend une voie plus complexe cristallisant une nouvelle urbanité, une réelle mutation de société … C’est ainsi qu’aujourd’hui, les street-artistes sont plus enclins à exposer leurs œuvres au sein de galeries.
Située dans le onzième arrondissement de Paris, la galerie Open Space est un nouvel espace dédié à l’art contemporain urbain. À partir du samedi 29 avril, l’artiste français C215 exposera ses œuvres dans le cadre d’une exposition inédite intitulée « La Mauvaise Réputation ». Pour cette exposition, la galerie Open Space lui a donné carte blanche et l’artiste préfère prévenir « Pour une fois, je travaille sur une exposition destinée non pas à vous faire plaisir, mais à m’exprimer sur le monde actuel, ses icônes nauséabondes, nos paradoxes. »
Appréciant particulièrement l’art urbain chez OLOW, Samantha et Nicolas de la galerie Open Space nous ont offert l’opportunité de collaborer avec C215 des tee-shirts édités en édition très limitée, exclusivement vendus lors du vernissage de l’exposition et sur le site OLOW. Afin de mieux comprendre les coulisses de cet univers, nous avons rencontré Samantha de la galerie Open Space…
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À la tête du magazine Grafitti Art mag depuis plusieurs années, était-ce pour vous une volonté depuis le début d’ouvrir une galerie spécialisée dans l’art urbain ?
Nicolas Chenus a fondé le magazine Graffiti Art en 2008. Je l’ai rejoint en 2009 et est devenue rédactrice en chef l’année suivante. Mais lui comme moi avons toujours développé une activité de commissaires d’exposition et d’agents d’artistes en parallèle de notre activité éditoriale. C’est Nicolas qui a fait venir Seen pour la première fois en France en 2007, ce qui lui a ouvert un marché et incité à s’installer un temps à Paris. Nicolas a été agent d’artistes pendant plusieurs années. Il s’est occupé de Mist, puis de Smash 137 et a ainsi largement contribué au succès qu’ils connaissent aujourd’hui. Pour ma part, enfant du street art et universitaire, j’ai curaté ma première exposition en 2003, rassemblant toute la scène du pochoir français. J’ai écrit plusieurs articles et livres sur le sujet autour desquels un cycle d’expositions internationales s’est notamment organisé à la fin des années 2000. Enfin, Nicolas et moi avons respectivement été directeurs artistiques de galeries parisiennes spécialisées en art urbain et qui connaissent aujourd’hui une certaine renommée. C’est suite à cette double expérience qu’en 2012, nous avons décidé de nous recentrer et d’ouvrir ensemble la Galerie Openspace. Notre activité de galeristes est donc très distincte de notre activité de journalistes et s’inscrit vraiment dans la continuité de nos parcours respectifs de curateurs. Tout en y intégrant notre vision spécifique et notre curiosité journalistique, ce qui nous a amené à nous intéresser à des talents internationaux que l’on n’avait jamais vus en France et à travailler de façon très différente de la plupart des galeries.
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C’est assez paradoxal d’exposer des street-artist en galerie car leur support de base est la rue, comment se passe les échanges avec eux ?
Les artistes issus du street art sont avant tout des artistes, sinon ce ne seraient en effet que des street artists. Nous faisons véritablement la distinction entre le street art qui ne concerne que l’art situé dans la rue et l’art contemporain urbain qui est fait par des artistes dont le travail s’inscrit à la fois dans l’espace public et dans l’espace d’exposition (galeries comme musées), avec comme dénominateur commun l’atelier. C’est dans cet espace de travail que tout se joue, dans un enrichissement mutuel. Les œuvres de ces artistes n’induisent pas la même lecture en cela qu’elles ne sont pas situées dans le même environnement. Le contexte de réalisation est lui aussi différent et ne permet donc pas le même processus créatif. C’est un mouvement extrêmement riche et diversifié. Le débat du passage de la rue à la galerie est assez daté et ne question plus beaucoup à vrai dire.
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C’est la première fois que vous exposez C215, un artiste très renommé dans l’univers de l’art urbain, comment l’avez-vous découvert ?
J’ai collaboré longuement avec C215 dans la seconde moitié des années 2000. Nous nous connaissons très bien. Mais nous n’avions pas travaillé ensemble depuis longtemps. C’est avec le recul de l’Histoire que Nicolas a souhaité proposer à Christian (Guémy – ndlr) de réfléchir au projet de faire une exposition ambitieuse à la galerie. Nous avions suivi avec attention son parcours au fil des années, observant son hyperactivité toujours aussi intense, malgré sa renommée et sa médiatisation croissantes. Nous sommes extrêmement fiers d’ouvrir cette exposition avec lui car c’est un artiste unique au destin exceptionnel. Et à destin exceptionnel, exposition exceptionnelle !
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Vous lui avez laissé carte blanche pour cette exposition, c’est une chose que vous faites avec tous les artistes que vous exposez ?
Non c’est très rare ! Nous aimons développer les projets dans le détail avec nos artistes. Nous sommes tous les deux assez psychorigides dans l’âme… Mais C215 est quelqu’un d’une extrême intelligence et d’un très grand humanisme. Et nous savions que la liberté était le plus beau cadeau à lui faire. Notre objectif était ici de réaliser un projet extraordinaire avec lui et de montrer à tous ses admirateurs comme ses détracteurs la palette de son talent et sa générosité d’artiste et d’homme. Cette exposition s’appelle La Mauvaise réputation et est à l’image de notre époque : marquée par l’incertitude politique et par des questionnements multiples. Elle est là pour nous faire réfléchir sur notre société, ses symboles, ses icones, et rétrospectivement, sur nous-mêmes. Et tout ça au travers d’une cinquantaine de portraits de divers personnages politiques, artistes, criminels, intellectuels, etc.
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Selon vous, quels sont les trois street-artistes à suivre de près ?
Si cela induit l’idée de suivre les talents de demain, je citerais Thomas Dartigues qui a un travail fou sur la ville, son espace et son histoire dans un vocabulaire minutieux et très technique. Éric Lacan est un autre artiste très technique que nous exposons en septembre. C’est un artiste obsédé par le temps qui passe, avec un travail sombre et romantique et une puissance picturale sans pareil. Enfin pour sortir de la France, je citerais le Polonais Robert Proch qui est tout simplement l’un des plus grands talents de ce siècle. Il aime bousculer nos repères spatiotemporels dans des toiles véhiculant à la fois une énergie chromatique folle et une touche picturale unique, de quoi se faire retourner Delacroix dans sa tombe ! Nous l’exposons à la galerie fin octobre, et info exclusive, il vient de se mettre à la sculpture sur bois !
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Tee-shirt C215 X OLOW pour l’exposition La Mauvaise Réputation disponible dès samedi 20 mai en ligne et lors du vernissage
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