Planchettes – Exhibition | rencontre avec Tizieu
Tizieu est un grand enfant qui calque ses rêves sur du papier blanc. Au son de la pluie qui toque à mon Velux, j’essaie de comprendre les réponses qu’il me calque sur le fond blanc de mon écran. Cause perdue (ou presque). Hors champ visuel, son imaginaire est vaste et curieux, perché sur de belles passions qui secouent son esprit. Il observe le monde et interprète le sien. Une éponge imbibée de nouvelles techniques, d’images, de sons et de cœurs. Il veut tout voir et tout essayé, tout apprendre de son art pour prouver fièrement que l’identité est un vilain défaut.
Rencontre avec l’un des artistes de l’exposition « Planchettes » .
Salut Tizieu ! À la minute où tu lis ces premiers mots, où te trouves-tu ?
Hey Salut mec ! Tout de suite, là, maintenant, je suis dans mon bureau. Je jongle entre les réseaux sociaux, mon taff, ces questions et l’envie d’aller flâner dehors !
Comment tout a commencé ? Es-tu né avec un crayon dans la bouche ? Raconte-moi !
Je suis né avec un crayon dans la bouche faut croire ! Aussi loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours dessiné pour m’occuper… Enfin si, j’aimais aussi construire des armes avec des rouleaux de cartons HAHA. La culture du DIY !
Sinon dès la sortie du collège j’ai cherché une orientation dans une filière créative. Une seconde option Arts plastiques puis un CAP et Bac Pro communication avec l’envie de terminer sur un BTS Communication visuelle (aujourd’hui BTS Design graphique). Comme beaucoup de jeunes, il me fallait du concret pour m’épanouir. En parallèle de mon BTS, le graffiti a pris une part très importante dans ma vie de créateur. Au lieu de glander durant nos temps libres, nous avions une activité : la création et le partage. Le résultat est là, certains sont typographes, graphistes, photographes, coloristes, illustrateurs. Je pense qu’on a tous appris beaucoup en cette période.
Un caméléon-hipster, un poulpe-chevalier, un lezard-biker, un burger à la fois dégueu et appétissant, des figures hyperactives, un rêve absolument délirant… Quelle relation entretiens-tu avec ton imaginaire ? Est-il incontrôlable ou arrives-tu quelques fois à le dompter ?
Oh tout ça est très contrôlable ! Je pars souvent d’une idée de base, qui se développe ensuite sur le papier. Mais avant ça, je peux avoir des heures de réflexion. En voiture, en promenade, au café, ça tourne, ça tourne… Jusqu’au moment où ca y est, je suis prêt ! Avant de me mettre à dessiner, le personnage ou la scène doit me parler, qu’il me donne envie de le connaître, en étant sûr de pouvoir le regarder longtemps. Je veux que ce soit mon pote, alors il y a un temps où l’on s’apprivoise !
En ce moment, j’ai un set de peinture à huile qui n’attend qu’une chose, que je m’y mette ! Pression, car je n’y connais rien, mais l’idée m’est venue très vite, je l’imagine très bien ce personnage, mais je n’arrive pas à le voir dans son environnement conceptuel, alors ça bloque. J’espère que tu ne me prends pas pour un fou, mais c’est comme ça que je vois les choses. Il y a un moment où l’idée arrive et un autre moment où elle prend vie.
Les couleurs sont absentes de tes illustrations. Pourquoi avoir tout misé sur le noir et blanc ? Des nuances auxquels tu tiens particulièrement ?
Ha, eh bien non. Je ne mise pas tout sur le noir et blanc. A un moment, j’ai envie d’utiliser la mine de plomb, à un autre l’encre et parfois la couleur, tu verras. Bon après, je te fais LA réponse classique : le noir et blanc est efficace, le rendu est percutant blah blah blah. Une partie de mes créations est également un prétexte à explorer et maitriser diverses techniques. Dans 2 ans on regardera peut-être mon taff en se disant : le mec, il il est passé par le gris, l’encre, le dot, le digital, l’huile, la lino, le vecto, la construction d’objet en bois, lu volume en pâte à sel (huhu), etc.
Mon but est d’être performant techniquement. Ça peut en perturber plus d’un au niveau identitaire, mais je ne m’en cache pas. C’est juste passionnant d’apprendre des choses nouvelles, et en plus, ça me permet d’ajouter des compétences à l’éventail que je propose à mes clients. Et puis, la deuxième partie de mon activité professionnelle est la formation/enseignement, ça explique peut-être cette envie d’étudier et de décortiquer tout un tas de choses.
Le freelance n’a jamais autant eu la côte. Et pourtant, il n’a jamais été aussi dur de vivre de sa passion. Qu’en penses-tu ?
Yep c’est très dur. Il y a beaucoup de monde. Vivre de sa passion est devenu un luxe. Mais dans la vie, on doit se payer ce luxe !!! Du moins, essayer. J’ai deux activités qui me facilitent un peu la vie. Heureusement ce sont deux choses que j’adore. La chose la plus embêtante est de ne pas se projeter sur 6-12 mois. J’ai volontairement zappé la partie caliméro, car forcément, j’ai des choses pas cool à dire, mais pourquoi se morfondre !?!?
Question inévitable #1 : qu’est-ce qui t’influence le plus ?
Je prends le temps de regarder les choses dans la rue, des moments de vie, un bon film… Classique quoi ! Du coup, je ne regarde plus vraiment du même oeil ce que fait tel ou tel artiste. Quand on est plus jeune, on se noie très vite dans ce flow d’images qui est à notre disposition via les médias. La musique est également un facteur de création et de motivation.
Une ambiance dans laquelle tu aimes dessiner ?
Et bien, j’ai envie de te dire : seul, à la maison, avec ou sans musique, tout dépend du projet.
La fille avec sa board sur ta planchette Olow, d’où arrive-t-elle ?
Et bien écoute, je travail pas mal à partir de photo. Je suis tombé sur ce modèle qui était pile-poil ce que je voulais faire ressortir sur ma planchette : du bois, une meuf à la cool (car j’en dessine rarement) et un traitement graphique impactant le noir et blanc (voir plus haut HAHA).
Question inévitable #2 : des projets, des envies de collaborations, des souhaits…
Des projets, il y en a quelques-uns : des dessins dans un clip, du custom d’objets vendus à grande échelle, des illustrations pour le 70ème anniversaire du débarquement, du vecto pour une application Apple, du toy, etc. Je fonctionne beaucoup aux coups de coeur et au challenge pour les collaborations. Alors niveau envie ou souhait, il ne faut pas hésiter à prendre contact avec moi.
Un petit défi pour finir. Pourrais-tu me donner le nom d’un artiste indé peu connu (musique, illustrateur, photographe… qu’importe !) qui pourrait bien faire l’objet de mon prochain papier pour Olow.
Parce que la famille (de coeur) est très importante pour moi, je te dirais direct mon pote Soap.
Tu peux voir une partie de son travail ici : http://heysoap.tumblr.com ou là https://vimeo.com/heysoap/. Autodidacte et passionné, c’est que du bon !
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Retrouvez toutes les œuvres et l’actualité de Tizieu sur son site officiel et sur Facebook.
Interview par © Julien Catala