UNNO, joyeux lurons et fantaisistes électroniques
UNNO, the UNexpected NOte, comme une billet surprenant, comme le cheveu sur une soupe où se mêlent et se démêlent plusieurs textures et surtout trois gars unis comme des frères : Awir Léon, J.Kid et Tismé. Tout droit issus du prolifique collectif dunkerquois Jayfly, le trio s’inscrit dans cette nouvelle vague d’artistes français qui prônent l’originalité et la poésie comme bases de leur travail.
Crédit : Pierre Volot
Pause. L’introduction ci-dessus manque d’originalité. J’aurais sans doute pu la copier sur un communiqué presse dont son fond animerait l’information pure et non la réflexion. Sans animosité ni aigreur de ma part, les quelques lignes qui m’ont été offertes de lire sur leur premier EP « As We Land » furent moins utiles que de lire une étude clinique du docteur Maboule. Des lignes si pauvres que les mots se forçaient de ne pas sombrer dans l’indifférence. De ce fait, parce qu’il me fallait avoir matière à écrire, j’ai posé quelques questions aux trois affreux. Je dis « affreux » comme je dirais « espiègles ».
Awir Léon : Bonjour, je suis « El Cantore » comme on dit chez moi. J’ai commencé par le début et ensuite je suis arrivé vers le milieu, je ne sais pas encore où est la fin par contre. Voila, je ne peux pas m’empêcher d’être poétique.
Tismé : Je suis le quota Guinéen/Malien d’UNNO. Parti de Gare du Nord, je suis arrivé avec succès à la gare de Dunkerque et j’y habite depuis 4 ans. Au sein d’UNNO, sur scène, je suis batteur, beatboxer, « choriste », et en studio je fais un peu de tout comme chacun de nous trois. La seule constante en studio c’est que notre auteur-chanteur national c’est Awir Léon et qu’il a choisi la langue de Shakespeare pour le faire. Joachim et moi, on ne parle pas anglais.
J.Kid : Je suis compositeur/arrangeur, j’ai commencé la musique via la guitare et la MAO sur le logiciel ACID chez Spock, le Grand Gourou de Jayfly, au début des années 2000 et me voilà aujourd’hui être un tiers de UNNO. Au sein du groupe je suis celui qui fonctionne en binaire : « ça déchire/c’est nul » !
Le taux sympathie de UNNO se mesure ainsi entre l’ironie et l’insolence. Le second degré est de mise et vient dénicher ce qu’il sont vraiment : une bande de potes. Mais tout de même, si toutes les bandes de potes faisaient de leurs délires un EP comme le leur, le monde musical s’en retrouverait forcément éblouie. Ce n’est pas le cas. Du moins, pas constamment. Cette rareté a tout de même un avantage : elle permet de ne baigner dans la complaisance et d’être plus juste et objectif dans notre jugement. Comparer UNNO à James Blake et Metronomy ? Non, c’est trop facile. Nous comparons tout à James Blake et Metronomy quand nous entendons le dubstep, le folk et la pop faire l’amour. Un ménage à trois, threesome. UNNO ressemble à UNNO, et c’est déjà pas mal.
Awir Léon : On essaye d’être le plus sincère possible dans notre musique. On ne pose pas trop de questions, mais c’est intéressant si les gens entendent des correspondances entre nos différents projets, si ça devient un puzzle où on reconnaît certaines pièces !
J.Kid : On a tous les trois autant d’influences communes que d’influences différentes et on s’influence aussi beaucoup l’un l’autre. C’est donc difficile après coup, même pour nous, de savoir qui a fait quoi. Du coup le mieux serait d’écrire un papier sur UNNO et de répondre à cette question pour nous. Toutes les réponses seront bonnes.
Tismé : Mais peut-être, c’est vrai qu’à nous trois, notre pâte est plus feuilletée. Ce coco d’Awir Léon s’oriente plus vers une pâte brisée.
Outre leur musique pleine de surprise, l’autre intelligence de UNNO est son esthétique. Une esthétique sonore, certes, mais aussi visuelle et transposée superbement par Julien Capelle sur le clip de « Walls ». Esprit rocambolesque, poésie boisée et folie mystique, voici les adjectifs traduisant l’humeur de la vidéo. C’était début mai 2016, suivant la sortie de l’EP début avril. Puis fin 2016, UNNO revient avec le monochrome rouge du single « Sirens », toujours chez leur maison parisienne Nowadays Records. Une légère évolution dans le son, peut-être moins infantile et intensément surprenante, au milieu des trois confluents, des trois hommes, des trois amis. Un estuaire comme repère, l’amitié comme boussole. La fratrie, la communion, le croisement… Bref, je m’égosille l’esprit. Ecoutez et vous comprendrez.